Entre-deux

Non, je ne boudais pas mon plaisir. Juste besoin d’inspirer de la vie pour déclencher mon inspiration. Qui n’est toujours pas là. Rien à foutre. J'emmerde l’inspiration et toutes ses muses ! Où en sommes-nous ? Eté, Marseille, wondermam, rayons. Ceux du soleil et ceux de la radiothérapie. Rayons qui ne font absolument pas bon ménage. Soit. Je resterai donc cloitrée jusqu’à une heure descente pour mettre le nez dehors. Non je peux pas. Tant pis. Je me tartine de crème protection 50. Non, 51 parce qu’on est à Marseille.

 

Pour l’instant, la radiothérapie reste un mystère total. Invisible, inodore, indolore... Autrement dit, je ne ressemble pas à un rosbif. Quelle chance ! Peut-être que ça viendra...

 

Dans une ville l’été, tout parait stagner. Un ticket pour le monde de l’entre deux. Une parenthèse. Pas vraiment les vacances mais presque. Des soins qui ne ressemblent pas à des soins. Des projets sans impératifs. Des rivages brouillés par les brumes de chaleur et la pollution. Le cri des mouettes sans la plage. Des sentiments en suspens, accrochés au ciel, comme des mobiles se balançant au gré de l’air qui manque.

Mur délabré
Mur délabré

Picotements ... Chatouillements ... Electricité ... Statique .... Fourmis ... Chaleur ... Circulation ... Sanguine ... Battements ... Bout des doigts.

 

Mon corps se réveille. Des milliers de petites lucioles scintillent à l’intérieur de mes bras. La machine redémarre. Une minie centrale nucléaire poursuit son programme, ses expériences là, en dessous. Sous ma peau. Ca vibre. Je fais bugger des engins. Je détraque les trucs. Toute la machine redémarre. 

Street art Valence Espagne
Street art Valence Espagne

Sinon... Rien. Justement. Savoir ne pas être productive, tout un programme. Dans ma tête, rien de constructif. Juste de la rumination. Toutes les questions que je n’ai pas eu le temps de me poser me reviennent à l’esprit comme un vieux boumerang pourri. Le deuxième effet de la deuxième lune. D’abord, il faut accepter la maladie. Ensuite, accepter les traitements et la nuée d’effets secondaires. Une fois que tout ça est passé, ce n’est pas terminé. Il faut accepter de guérir. Ben oui, si c’était si simple, ce ne serait pas drôle ! Dire que la sagesse n’est même pas au bout du chemin... On n’a même pas droit à une médaille. En plus pour épicer un peu le tout, l’arrivée de l’hormonothérapie. C’est à ce moment là, insidieusement d’abord puis de manière évidente, qu’on a l’impression de n’être qu’une énorme hormone ambulante. Une espèce de vague vague à l’âme survient à un moment où on a envie de TOUT tout de suite. Comme d’hab, pas de panique, inspire... Exprire ... L’hormonothérapie ... Pas grave, ça ne durera que 10 ans ! Les remèdes ? Je cherche... Aller chez le kiné. Faire du yoga. Ingurgiter des films, y compris des films absolument déconseillés. En effet, moi qui ne porte aucun chromosome masochiste habituellement, je me suis laissée glisser dans la brèche du film à ne pas voir : « Nos étoiles contraires ». J’adore William Defoe. C’est ça le problème. L’histoire de deux jeunes ados gravement malades qui tombent amoureux. C’est beau mais c’est du poison !!! NON AU PATHOS. Je commence à peine à m’en remettre.  Dans mon for inconscient, j’ai du me dire que j’allais toucher le fond pour pouvoir rebondir. Ca n’a pas vraiment fonctionné... Au lieu de ça, je suis restée plongée dans un brouillard obscur, avec en supplément une bonne vieille mélancolie de derrière les fagots. Fallait pas. Bon, il est temps de rejoindre la berge, j’ai pas que ça à foutre. Ecouter ACDC à fond la caisse, monter dans une voiture, un train, un bateau ou un avion et aller s’aérer la tête ailleurs. Voilà la solution.

 

 

Toc toc ...

 

 

Que faire de ma perruque ? Voilà la question qui me taraude les méninges depuis quelque temps. Oui, la fameuse perruque, magnifique coupe courte châtain clair avec transparence aérodynamique. Oui, celle que je n’ai jamais mise... Détrompez vous, ceci n’est pas une pub... Il s’agit d’une réflexion intense et métaphysique. J’avoue sans peine que voir cette boite avec cette touffe, ses barrettes et ses shampoings coiffants tous les matins, j’ai connu mieux. La vendre ? Oui, elle est neuve et vaut son prix. Le bon coin ? Oui quelle bonne idées mais non, accessoire refusé... Bon. La donner ? Oui, probablement.