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Street art Valence Espagne
Street art Valence Espagne

J’ai toujours eu de la chance et je le pense d’autant plus en ce moment. Pourquoi ? Ca, je le garde pour plus tard. Une des plus grandes chances actuellement : je suis bien entourée. Bien entourée c’est à dire entourée de gens que j’aime et qui m’aiment, présents et attentifs sans être étouffants. Mais surtout des gens qui ne m’angoissent pas. Chose relativement rare par les temps qui courent.

 A dire vrai, j’ai tout de même un peu goûté au ton dramatique et aux voix remplies de pathos jusqu’à la moelle. Bon, d’accord je veux bien qu’on se laisse, sur le moment, envahir par le choc, d’ailleurs je n’en veux à personne. L’essentiel étant que ça ne dure pas.

 Mais j’ai eu, d’ores et déjà l’occasion de découvrir un phénomène beaucoup plus surprenant. Certaines personnes ont l’air de penser que je suis subitement devenue oncologue spécialiste des tumeurs en tout genre et en particulier au sein, bien sûr.

 Par exemple, alors que je me rendais au restaurant, la mine pourtant légère je croise la patronne que je côtoie de temps à autre sans vraiment la connaitre comme c’est souvent le cas dans notre petite île.

 

-« Ca va ?

- Oui mais c’est à toi qu’il faut demander ça... »

 

A ces mots qui naturellement étaient accompagnés de la voix et du regard de circonstance, je me suis dit que j’allais avoir droit au quart d’heure explicatif. Elle m’a prise en traitre. J’étais en dessous de la vérité.

 Revêtue de mon masque de sourire numéro 5 genre diplomate sympathique, j’expliquais que tout irait bien, prête à me rendre à ma table, et c’est là qu’elle commençât sa tirade.

 Un monologue de 5 minutes, ça peut être très long, concernant un pan complet de sa vie mammaire.

 J’ai tout su. Je vous résume : une grosseur était apparue un matin, elle a alors consulté un médecin. Le médecin croyait qu’elle allaitait tellement la peau était rouge. En réalité, c’était infecté et finalement il s’est avéré que c’était un abcès. Le tout lâché à un volume certain en plein milieu du restaurant.

 J’avoue que je suis restée sans voix. Elle a réussi à me couper dans mon élan. 

 Après un instant d’incertitude, j’ai finalement pris la fuite en lui conseillant  d’aller consulter les autorités compétentes en cas de doute. Chose évidente au demeurant.

 En me remémorant cette scène, j’ai fini par comprendre. Le but de cette manœuvre était de s’assurer que ses symptômes ne ressemblaient pas aux miens. J’ai compris par la même occasion que ce ne serait pas la dernière.